play_arrow

ASpaceMR

Acte 3.3 – Une rouge désolation

ASoundMR 26 août 2023


Background

S’abonner au podcast

Texte de l’épisode

La prochaine planète que nous allons visiter est aussi la dernière composée de roches.

C’est la plus connue, la plus fantasmée. L’objectif de la course à l’espace actuel.

D’une couleur rouille, elle a reçu le nom du dieu de la guerre  :

Mars


 Mais si on parle beaucoup de coloniser la planète rouge, cela ne veut pas dire qu’elle est comparable en tout points à la Terre. 

Contrairement à ce que l’on imagine, elle loin d’être de taille égale à la Terre, elle est bien plus petite : à peine 6800 km de diamètre, à peine plus de la moitié du diamètre de la Terre ou le double de celui de la Lune.

Jupiter y est probablement pour beaucoup, ayant volé à Mars les matériaux qui auraient pu la rendre plus grosse et créant au passage la ceinture d’astéroïde dont nous parlerons plus tard.


 La gravité à sa surface est d’environ un tiers par rapport à la Terre.

Or cela est l’un des multiples problèmes que pose Mars pour une colonisation potentielle car nos corps sont faits pour subir une gravité donnée, et en l’absence de cette dernière ou si elle est trop faible, nos os se détériorent.


 Elle est plus éloignée de la Terre que ne l’est Vénus, orbitant à 1.5 unités astronomiques du Soleil en moyenne, lui prodiguant bien moins de chaleur.

C’est l’occasion de parler de la façon dont la lumière, et donc la chaleur du soleil se comporte avec la distance.

Imagine le soleil au centre d’une sphère de rayon 1, comme 1 unité astronomique par exemple. Le Soleil va réchauffer toute la surface de la sphère.

Si tu te souviens de tes cours de mathématiques, tu sais que la surface d’un cercle c’est piR², et si tu es très doué, que la surface d’une sphère est 4piR²

Bref, l’important ici à retenir, c’est que la surface dépend du rayon au carré.

Cela veut dire que si la sphère fait 2 unités astronomiques, alors la surface de la sphère n’est non pas 2 fois plus grande, mais 4 fois plus grande. Et la chaleur sera alors répartie de sorte que chaque mètre carré éclairé le sera non pas 2 fois moins, mais 4 fois moins.

Si la sphère est 4 fois plus grande, 4×4, 16 alors la surface sera 16 fois moins éclairée etc.


 Sur Mars, à 1.5 unités astronomiques, le Soleil est un peu plus de deux fois moins brillant, il fait donc un climat plutôt froid sur Mars, avec un température moyenne de -63°C. Pour comparer, la température moyenne de la Terre est de +15°C

A l’équateur en été il peut faire sur Mars plus de  20°C en plein milieu de la journée, et la nuit, la température peut chuter en dessous de -140°C.


 Je parle d’été car oui, Mars a des saisons, comme la Terre. Elle est inclinée sur son axe de rotation d’environ 25°, contre 23° pour notre planète, donc c’est assez proche.

En revanche, la Terre tourne autour du Soleil de manière quasi circulaire, avec 1% d’excentricité, alors que Mars a une excentricité de 9%, ce qui donne une orbite bien plus elliptique. Une partie de l’année, Mars est un peu plus proche du Soleil, et comme on l’a vu quand on a parlé de gravité, plus on est proche du corps que l’on orbite, plus on va vite.

Et cela fait que les saisons où Mars est plus près de notre étoile sont plus courtes que celles où elle est plus éloignée. Et petite particularité : l’hiver dans l’hémisphère Nord de la planète rouge est au moment où elle est le plus près du Soleil. C’est contre-intuitif mais c’est comme ça.

Mais comme sur Terre, ce n’est pas la distance par rapport à notre étoile qui détermine les saisons, mais l’angle d’incidence de sa lumière, l’angle avec lequel les rayons frappent la surface.

Verticaux, ils fournissent plus d’énergie concentrée que lorsqu’ils s’étalent sur une surface inclinée.

L’hémisphère nord martien connaît donc un hiver court et « doux » alors qu’il est long et froid dans l’hémisphère sud – où l’été est plus court mais plus chaud que dans l’hémisphère nord


 Un an sur Mars est plus long car la planète met 687 jours terrestres à faire le tour du Soleil.

Au niveau des durées dans l’hémisphère Nord, le printemps dure 194 jours et l’été dure 178 jours tandis que l’automne ne dure que 143 jours et l’hiver 154 jours.


 Elle a aussi des jours qui ne durent pas 24h mais 24h et 39 minutes, un jour martien est appelé un “sol”.

Parlons un peu de la surface de Mars car elle est particulière, à commencer par sa couleur. Elle n’est pas de couleur rouille par hasard, elle en est littéralement recouverte. On appelle ça de l’oxyde de fer. Cette rouille est présente sous forme de poussière qui se dépose et se répartit sur la planète au gré des tempêtes.


 D’autre part, la planète Mars se caractérise par une opposition très nette entre l’hémisphère nord constitué de vastes plaines lisses, et l’hémisphère sud formé de plateaux riches en cratères d’impacts. L’hémisphère nord est entre 1 km et 3 km moins élevé que l’hémisphère sud, et l’épaisseur de la croûte y est de 32 km contre 58 km pour les plateaux du sud.


 Cette différence serait apparue il y a environ 4 milliards d’années. Le coeur des géophysiciens balance aujourd’hui entre deux théories pour expliquer cette coupure: l’une est liée à la dynamique interne de la planète (au niveau du manteau et tectonique des plaques), et l’autre à un ou plusieurs grands bombardements qui auraient entraîné la fusion des terrains de l’hémisphère nord.

Mars ne possède pas de tectonique des plaques. D’où la taille colossale de ses volcans. 


 Au contact de la limite géologique matérialisant la frontière entre ces deux hémisphères si différents, les régions du Dôme (Tharsis) et d’Elysium Planitia regroupent une forte concentration de volcans. C’est d’ailleurs sur le renflement de Tharsis que se trouve le plus grand volcan du Système solaire, l’Olympus Mons, qui culmine à plus de 21 kilomètres d’altitude, soit plus de 2x l’Everest. C’est le plus grand volcan du système solaire.


 Sur notre planète, la croûte se déplace par rapport au point chaud situé dans le manteau qui éjecte de la lave en surface, ce qui forme une succession de petits volcans. Sur Mars, la lave s’accumule en un seul et même point donnant naissance à des volcans gigantesques. Aujourd’hui, la planète rouge a perdu la quasi-totalité de son activité géologique interne. Seuls quelques glissements de terrain, geysers de CO² aux pôles, séismes et petites coulées de lave se produisent encore.


 De son côté, l’hémisphère sud de Mars est parsemé de cratères d’impacts. Argyre Planitia et Hellas Planitia sont les deux plus remarquables. Le second d’environ 2 200 km de diamètre et 9 500 m de profondeur est la plus grande structure d’impact observable sur la planète.

Contrairement aux cratères lunaires dont l’aspect ne change pas avec le temps, les cratères martiens sont soumis à une érosion d’origine atmosphérique qui altère leur forme, arrondit leurs bords et recouvre leur intérieur d’une épaisse couche de poussières. Ils restent cependant bien visibles.


 Par ailleurs, la surface de la planète rouge est dotée du plus grand canyon du Système solaire. Les gorges du Valles Marineris atteignent 8 000 m de profondeur et s’étendent d’ouest en est sur plus de 3000 km. En comparaison, le Grand canyon en Arizona (États-Unis) est profond d’au maximum 1,8 km pour 800 km de long…

Dans le voisinage de Valles Marineris, une multitude de petites vallées évoquent des lits de rivière asséchés. Un indice qui oriente les scientifiques vers une histoire de Mars durant laquelle l’eau liquide coulait à flots.


 Comme la Terre, la planète rouge est recouverte de calottes glaciaires aux deux pôles – ce qui n’est pas surprenant compte tenu des températures pouvant descendre à des niveaux très bas. Toutefois, une différence majeure est à souligner par rapport à notre planète. Sur Mars, il s’agit majoritairement d’une glace sèche composée de dioxyde de carbone. Ce CO2 – qui représente près de 96% de l’atmosphère martienne – passe de l’état gazeux à l’état solide en dessous de -125°C.

Et comme sur Terre, elles évoluent en fonction des saisons, grossissant en hiver et fondant aux saisons chaudes. Mais elles ne font pas de liquide, elles se subliment, passant de l’état solide à l’état gazeux directement pour en composer l’atmosphère.

La planète rouge dispose d’une atmosphère fine mais existante, composée de CO2, dont on a vu qu’il était un gaz à effet de serre, sauf que la pression atmosphérique est 100 fois plus faible que celle sur Terre, donc son effet est assez négligeable comparé à Vénus. 


 Néanmoins, cette fine atmosphère est utilisé lorsque des sondes veulent atterrir sur la planète Rouge. Le taux de ralentissement est bien moindre que lors d’une rentrée dans l’atmosphère terrestre, mais conjugués à des systèmes de freinage, il suffit à faire baisser la vitesse pour un atterrissage en douceur… lorsque tout se passe bien.

Long d’environ sept minutes, l’atterrissage des véhicules à destination est toujours mouvementé ; il est même qualifié de « sept minutes de terreur », en raison du risque très élevé qu’ils encourent lors de cette manœuvre.

Vers la fin du printemps austral, lorsque Mars est au plus près du Soleil, des tempêtes peuvent apparaître. Comme la pression atmosphérique sur Mars n’est que le centième de la pression terrestre, ces tempêtes peuvent devenir planétaires et durer plusieurs mois. La poussière est alors soulevée et rend la surface de Mars quasiment invisible ! 

Lors de certaines tempêtes martiennes, les vents peuvent atteindre voire dépasser les 100 km/h. Ces violentes rafales sont alors susceptibles de souffler durant de longues semaines, si bien que les importantes quantités de poussière qu’elles soulèvent peuvent faire baisser la température moyenne en surface de 4°C en filtrant une partie des rayons du Soleil.


 Pourquoi l’atmosphère est-elle si ténue? à cause de la faible gravité, entre autres, mais aussi car le Soleil arrache en permanence de l’atmosphère à la planète.

Au centre de la Terre, nous disposons d’un noyau de fer et de nickel en fusion avec des convections (les mêmes turbulences circulaires que l’eau bouillante de tes pâtes dans ta casserole).

Ces convections   ainsi que sa rotation créent un champs magnétique tout autour de la Terre qui font plusieurs fois la taille de notre planète.


 Ce champs magnétique dévie les vents solaires et les maintient à distance de notre atmosphère… avec parfois quelques magnifiques retombées là où les arcs magnétiques se rejoignent, aux pôles magnétiques et qui sont à l’origine d’un des plus beaux spectacles de notre planète : les aurores boréales et australes qui illuminent le ciel par l’interaction des vents solaires capturés et les molécules de notre atmosphère….mais peuvent être aussi dangereuses lorsqu’elles perturbent satellites et autres systèmes de télécommunications.

Les radiations sont un problème pour l’exploration que l’on rencontre partout dans le système solaire, dès que l’on sort de l’atmosphère et pire, d’un champ magnétique d’une planète. Les astronautes dans l’ISS sont protégés par le champ magnétique de la Terre mais ils sont déjà bien plus exposés. D’ailleurs, même vous en prenant l’avion, avec l’altitude qui vous retire des couches protectrices d’atmosphère, vous subissez un rayonnement plus important qu’au sol. Rien de mortel, bien entendu, en plus le fuselage vous protège un peu, mais néanmoins notable.


 Ces radiations peuvent causer des cancers car pour simplifier, elles détruisent l’ADN des cellules qui se répliquent alors en perpétuant ces défauts et cela peut donner des résultats imprévisibles, comme une réplication non contrôlée, formant des tumeurs.

Pour aller sur la Lune, non seulement il faut être protégé car nous sortons du champ magnétique, mais il faut traverser ou contourner une zone où les radiations s’accumulent, piégée, appelée ceinture de Van Hallen. En réalité, il y a deux zones vraiment concentrées, une très près de la Terre entre 1000 et 8000 km de la surface, très concentrée, et une seconde, de 12000 à 25000 km, qui est bien plus étendue.

Mais cette ceinture, comme son nom l’indique, n’est pas une sphère autour de la Terre, mais plutôt de la forme d’un donut géant qui suit l’équateur magnétique.


 Mais pour le meilleur comme le pire, rien de cela sur Mars, le rayonnement solaire n’est que très peu filtré par l’atmosphère, non dévié par un champ magnétique et donc les radiations y sont puissantes et mortelles. Si l’air était respirable, de simples vêtements très chauds ne suffiraient pas pour profiter de la planète.

Avec la Terre, c’est l’une des deux seules planètes telluriques à posséder des satellites naturels. Dans le cas de Mars, elle en possède 2 : Phobos et Déimos.


 Bien plus petits que notre Lune, la plus grosse lune, Phobos, fait 27km par 21km par 18 km et elles ont toutes deux une forme irrégulière, un patatoïde en quelque sorte.

Comme pour la Lune, l’hypothèse d’un disque présent lors de la formation de la planète ou l’hypothèse d’un impact ont été étudiées et la théorie d’un impact gigantesque est privilégiée.

Mais la présence de la ceinture d’astéroïde après Mars n’exclut pas l’hypothèse de la capture.


 Alors la vie a-t-elle pu à un moment donné se développer sur Mars ?

On pense que non seulement c’est possible mais que la raison pour laquelle la planète rouge est si peu propice à la vie à l’heure actuelle pourrait être une présence passée de la vie.


 Il y a 4 milliards d’années, le système solaire est encore jeune. Le processus de formation des planètes qui le constituent touche à sa fin, et le bombardement d’astéroïdes auquel celles-ci sont soumises s’atténue.

Notre planète devient alors habitable puis, quelque temps plus tard (quelques dizaines ou centaines de millions d’années), habitée. La biosphère primitive de notre planète est alors bien différente de ce qu’elle est aujourd’hui. La vie n’a pas encore inventé la photosynthèse, sa source principale d’énergie aujourd’hui.

Ces microbes primordiaux – les ancêtres communs à toute forme actuelle de vie sur Terre – doivent donc survivre dans les océans de notre planète en utilisant une autre source d’énergie : la consommation d’espèces chimiques libérées par l’intérieur de la planète.


 Ces micro-organismes se nourrissent du CO2 (dioxyde de carbone) et du H2 (dihydrogène) alors abondants dans l’atmosphère (le H2 représente alors 0,01 à 0,1 % de la composition atmosphérique contre approximativement 0,00005 % aujourd’hui) et récoltent ainsi une quantité d’énergie suffisante pour coloniser la surface des océans de la planète

On appelle ces organismes “méthanogènes” car ils génèrent du méthane.


 Ce puissant gaz à effet de serre s’y accumule et réchauffe le climat, à une époque où un soleil moins brillant qu’aujourd’hui n’est pas nécessairement en mesure de maintenir à lui seul des conditions tempérées à la surface de la planète. L’apparition de la vie sur Terre à donc pu participer à consolider l’habitabilité de notre planète et à établir les conditions favorables à l’évolution et à la complexification de la biosphère terrestre durant les milliards d’années qui suivront.

S’il s’agit du scénario le plus probable de l’évolution précoce de l’habitabilité de la Terre.

Alors quel serait le scénario sur Mars ? Voici une hypothèse parmi d’autres : 


 Une vie microbienne martienne aurait pu trouver dans les quatre premiers kilomètres de la croûte poreuse de Mars un abri aux conditions rigoureuses de la surface (en particulier aux radiations), des températures favorables et compatibles avec la présence d’eau liquide, et d’une source potentiellement abondante d’énergie sous la forme de gaz atmosphériques diffusant dans la croûte.

Un certain nombre d’indices géologiques indiquent que de l’eau liquide circulait à la surface de Mars il y a 4 milliards d’années, formant des rivières, des lacs, et même potentiellement des océans. Il n’y a qu’à voir la forme très particulière de Valles Marineris, dont je t’ai parlé tout à l’heure. Le climat de Mars était donc plus tempéré qu’il ne l’est aujourd’hui. Pour expliquer un tel climat, notre modèle de surface prédit que l’atmosphère de Mars était dense (à peu près autant que l’atmosphère terrestre actuelle) et particulièrement riche en CO2 et H2, plus encore que ne l’était à l’époque l’atmosphère terrestre.


 Ce contexte atmosphérique particulièrement riche en CO2 aurait en effet conféré au H2 atmosphérique les caractéristiques d’un gaz à effet de serre particulièrement puissant, plus puissant que ne l’aurait été dans les mêmes conditions le méthane. Autrement dit, 1 % de H2 dans l’atmosphère réchauffe alors plus le climat de Mars que 1 % de méthane.

Dans quelques-uns des scénarios produits par notre modèle, cet effet de serre ne suffit pas à produire les conditions climatiques nécessaires au maintien d’eau liquide à la surface de Mars : la planète rouge est alors recouverte de glace. Si des températures viables existent dans les profondeurs de la croûte, celle-ci n’en demeure pas moins inhabitable : bloqués par la glace de surface, le CO2 et le H2 atmosphériques – source d’énergie indispensable à la vie qui s’en nourrit– ne peuvent pas pénétrer dans la croûte.


 Dans la majorité de nos scénarios cependant, la présence d’eau liquide à la surface de Mars est possible au moins dans les régions les plus chaudes. Dans ces régions, le CO2 et le H2 atmosphériques peuvent pénétrer dans la croûte. Notre modèle biologique prédit alors que dans l’intégralité de ces scénarios, les micro-organismes méthanogènes auraient trouvé des températures viables et eu accès à une source d’énergie suffisante à leur survie dans les premières centaines de mètres de croûte. 

Pour résumer, bien que nous n’ayons à l’heure actuelle aucune preuve factuelle d’une vie passée ou présente sur Mars, la croûte de Mars aurait très probablement pu abriter une biosphère souterraine composée de micro-organismes méthanogènes il y a 4 milliards d’années.


 Ces hypothétiques méthanogènes martiens auraient-ils pu, tout comme leurs homologues sur Terre, réchauffer le climat de leur planète ? Notre histoire devient ici moins optimiste. Une biosphère souterraine basée sur la méthanogénèse aurait profondément modifié l’atmosphère de Mars, consommant la grande majorité de son H2 et relâchant une quantité importante de CH4.

Or, comme nous l’avons vu, le H2 est dans le contexte de l’atmosphère précoce de Mars un gaz à effet de serre plus puissant que le CH4. 


 Alors que l’apparition de la méthanogénèse sur terre a participé à établir un climat favorable consolidant ainsi l’habitabilité terrestre, une vie méthanogène martienne aurait, en consommant la majorité du H2 atmosphérique de Mars, brutalement refroidi le climat de plusieurs dizaines de degrés et participé à l’expansion de la couverture de glace. Dans les régions encore libres de glace en surface, nos micro-organismes auraient par ailleurs probablement eu à s’enfoncer bien plus profondément dans la croûte afin de trouver des températures viables, s’éloignant ainsi de leur source atmosphérique d’énergie. Mars serait donc devenue sous l’action de la vie bien moins accueillante qu’elle ne l’était initialement.

Qu’est-ce que l’étude d’une vie passée sur Mars nous apprend ?


 Dans les années 70, James Lovelock et Lynn Margulis développent l’hypothèse Gaïa : l’habitabilité de la Terre est maintenue par une “autorégulation harmonieuse et mutuelle de la biosphère terrestre” (une autre façon de dire “écosystème”) et de la planète Terre. Nous, l’espèce humaine, étions dans ce cadre une fâcheuse exception. 

Ce concept, certes un peu new age, à conduit à l’émergence de l’idée « goulot d’étranglement Gaïen » : ce ne sont peut-être pas les conditions nécessaires à la vie qui manquent dans l’univers mais la capacité de la vie, une fois apparue, à maintenir sur le long terme l’habitabilité de son environnement planétaire. Ce que suggère notre étude est encore plus pessimiste. Comme le montre l’exemple de la méthanogénèse sur Mars, la vie – même très simple – peut dans certaines conditions activement compromettre l’habitabilité de son environnement planétaire. 


 Est-il alors possible que cette tendance à l’autodestruction limite l’abondance de la vie dans l’univers ? En sommes-nous un exemple ? Ou est-ce nous donner encore une fois trop d’importance ?

Encore une fois, après Venus, cela fait déjà deux fois que nous arrivons trop tard pour contempler une planète potentiellement habitable.

Ceinture d’astéroïdes

Au-delà de Mars, les distances commencent à s’agrandir entre les planètes. La prochaine sur notre feuille de route est à plus de deux fois la distance entre Mars et le Soleil.


 Mais avant de l’atteindre, nous devons traverser une ceinture de débris de tailles multiples.

Elle est appelée simplement “Ceinture d’astéroïdes”. 


 Elle s’étend sur une distance gigantesque : près de 3 fois la distance entre le Soleil et la Terre.

La plupart des scientifiques considèrent que la ceinture d’astéroïdes est composée de résidus du Système solaire primitif qui n’ont jamais formé de planète. 


 À l’origine, il avait été avancé que la ceinture proviendrait de la fragmentation d’une planète (nommée Phaéton). Cette hypothèse est tombée en désuétude à cause d’un certain nombre de problèmes. Le premier concerne l’énorme énergie nécessaire. Un autre est la faible masse totale de la ceinture, qui n’est qu’une fraction de celle de la Lune. 


 Enfin, les différences de composition chimique entre les astéroïdes sont difficiles à expliquer si tous proviennent du même corps.

La ceinture d’astéroïdes comprend principalement trois catégories d’astéroïdes. Dans la partie externe, près de l’orbite de Jupiter, les astéroïdes riches en carbone prédominent. Ces astéroïdes incluent plus de 75 % de tous les astéroïdes visibles. Ils sont plus rouges que les autres astéroïdes et possèdent une réflexion très faible. Du point de vue chimique, leur spectre indique une composition analogue à celle du Système solaire primitif, sans les éléments légers et volatils (comme les glaces).


 Vers la portion interne de la ceinture, aux alentours de 2,5 UA du Soleil, les astéroïdes riches en silicates sont les plus courants. Le spectre de leur surface révèle la présence donc de silicates mais aussi de quelques métaux, mais aucun composé carboné significatif. Ils sont donc constitués de matériaux profondément modifiés depuis les débuts du Système solaire. Ils possèdent une réflexion relativement élevée et forment 17 % du total.

Une troisième catégorie, regroupant 10 % du total, est celle des astéroïdes de type métalliques. Leur spectre ressemble à celui d’un alliage fer-nickel, avec une apparence blanche ou légèrement rouge et aucune caractéristique d’absorption. On pense que certains astéroïdes de type métalliques se sont formés dans les noyaux d’objets plus lourds qui ont été fragmentés par collision. À l’intérieur de la ceinture, la distribution des astéroïdes de type métalliques culmine à 2,7 Unités Astronomiques du Soleil. 


 Étudier ces astéroïdes donne un aperçu des premiers instants de la formation des planètes de notre système solaire.

On pense que la formation des planètes suit un processus analogue à l’hypothèse de la nébuleuse solaire, qui suppose qu’un nuage de poussière et de gaz interplanétaire s’est effondré sous l’influence de sa propre gravité pour former un disque en rotation qui s’est condensé pour former le soleil et les planètes. Pendant les premiers millions d’années du Système solaire, un processus d’accrétion a graduellement accru la taille des corps, jusqu’à former les différentes planètes.

Dans les régions où la vitesse moyenne des collisions était trop élevée, la dislocation des planétésimaux tendait à dominer l’accrétion, empêchant la formation de corps suffisamment grands. 


 De plus, les effets de résonance orbitale avec Jupiter tendent à perturber les petits corps vers d’autres orbites. La région située entre Mars et Jupiter contient plusieurs fortes résonances. 

On peut imaginer que ces astéroïdes auraient pu compléter Mars qui aurait eu une taille similaire à celle de Vénus ou de la Terre si Jupiter n’en avait pas perturbé les trajectoires.


 Jupiter ayant migré vers le Soleil à la suite de sa formation, ces résonances ont balayé la ceinture d’astéroïdes, excitant la population des planétésimaux (les corps célestes constitués dans un disque protoplanétaire ou un disque de débris), accroissant leur vitesse relative. Les planétésimaux de cette région furent (et continuent à être) de la taille allant du grain de poussière au planétoïde de quelques centaines de kilomètres de diamètre.

Ce planétoïde a un nom : Ceres.

C’est la plus petite planète naine connue du Système solaire, mais aussi le plus gros des astéroïdes de la ceinture principale ; c’est la seule planète naine située dans la ceinture d’astéroïdes. Elle a un diamètre d’environ 950 kilomètres, environ la taille de la France et sa masse représente environ le tiers de la masse totale des astéroïdes de cette ceinture.


 Car contrairement à une idée courante, et malgré le nombre d’astéroïdes qui la composent, la ceinture d’astéroïdes reste essentiellement vide et chaque astéroïde est généralement séparé du plus proche par en moyenne un million de kilomètres, 80 fois le diamètre de notre Terre.

On est bien loin du jeu Asteroid, ou des scènes de poursuite dans Star Wars, lorsque les astéroïdes sont des menaces immédiates et nombreuses.


 On peut donc la traverser sans encombre et nous diriger vers notre destination, Jupiter.

Mais alors que l’on s’en éloigne, regardons une dernière fois la petite planète rouge, îlot de tous les fantasmes d’explorations scientifiques et de colonisation d’égo surdimensionnés.


 Peut-être mérite-t-elle de conserver une paix relative, une étude plus poussée de ses merveilles, avant que de riches milliardaires viennent y imposer la marque indélébile d’une conquête humaine.


 On pourrait alors simplement l’admirer pour ce qu’elle est, avec le ballet des sondes qui gravitent autour d’elles pendant que de petits explorateurs robotiques, bien plus aptes à s’adapter aux conditions à sa surface, transmettent au monde les belles observations de leurs aventures.

Notre rapport à Mars est emblématique de notre rapport à ce qui nous entoure. Nous parlons de forcer un environnement qui n’est pas le nôtre à nous accueillir, souhaitant jusqu’à changer son atmosphère pour nous convenir, on parle alors de terraformer, au lieu de respecter notre place, simple invités de l’Univers.

Une production ASoundMR

Crédit image

  • Artwork ASpaceMR: Greg Rakozy https://unsplash.com/photos/0LU4vO5iFpM
Previous episode
Post comments (0)

Leave a reply

Your email address will not be published. Required fields are marked *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.